ARMORIAL DES MAYEURS D'ARRAS - par M. ACHMET D'HÉRICOURT - 1868

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Armes: blasons et parfois cimier, légende et devise, tenants et supports et autres ornements extérieurs.
Noms et blasons des Prévôts des marchands de Lyon, 1596 - 1789

Le nom du Mayeur se trouve à Arras dès le XIIe siècle; on le voit en 1101 dans une bulle d'un pape. Le premier est Jacques; signalons ensuite Dondon de Lens. Le mayeur, malgré son titre, avait des fonctions peu importantes; il assistait à la réunion des échevins, mais il ne pouvait prendre part à leurs délibérations. Il était chargé de la garde de la bancloque ou cloche municipale, de la défense des fortifications, de la surveillance des poids et mesures; lorsqu'on détruisait une maison ou qu'on effondrait un tonneau de vin, il avait les vieux bois, les futailles. A lui aussi revenaient les anciennes bannières, et lorsqu'il allait à la guerre, les frais qu'il faisait lui étaient payés.
La charge de Mayeur fut érigée en office en 1302, sous Robert II, comte d'Artois, l'héroïque vaincu de Courtrai, au profit de Simon Faoerel et de ses héritiers, moyennant une somme de soixante sols parisis. Mais en 1414, Jean de Bourgogne, comte d'Artois, racheta cette charge de Colard de Montbertaut son chambellan, moyennant 80 florins, dont la moitié fut payée à Jeanne Louchand : la charge devait être confiée chaque année par le gouverneur à un bourgeois natif d'Arras et digne d'en remplir les fonctions. Déjà Simon Faverel avait déclaré que ses forces et son grand âge ne lui permettaient plus de veiller à la garde de la ville, et il avait prié le lieutenant du bailli de le remplacer. Il figure en 1414 comme Mayeur viager, et Jean Sacquespée comme Mayeur.

Montbertaut, originaire d'Artois, portait d'azur à l'aigle d'or becqué et membré de gueules. Le plus ancien nom que nous trouvions sur le Registre aux bourgeois est Colard de Montbertaut, en 1407 (février). Cette famille resta dans le pays. On rencontre des seigneurs de Boiry Saint-Martin en 1559 et un lieutenant-colonel de la cité le 26 novembre 1631, des licenciés ès-lois, des maîtres ès-arts. La première fois que nous trouvons le titre de chevalier, il appartient à messire Philippe, seigneur de Beaudimont, le 6 avril 1551; dès lors, on ne trouve plus mention de cette famille sur les registres échevinaux ; peut-être quitta-t-elle la ville. Carpentier mentionne les donations de Sacquespée à la confrérie de Notre-Dame des Ardents, fondée en 1215, et qui avait élevé sur la place d'Arras cette élégante chapelle connue sous le nom de Cierge de pierre (Cette chapelle fut détruite pendant la révolution du siècle dernier; mais, sur les dessins conservés, M. Grigny, dont les arts déplorent la perte récente, a élevé la gracieuse église des Ursulines d'Arras.).

Lyonnel, que d'autres appellent Adrien de Saint-Vaast, portait d'azur, à l'aigle d'or becqué et membré de même. Une autre famille, originaire du Cambrésis, a pour armoiries : Burelé d'argent et d'azur à deux bars adossés de gueules brochant sur le tout. La famille de Saint-Vaast ne figure sur les registres municipaux qu'à cause de ses alliances. Il y a tout lieu de croire que Lyonnel était brabançon, puisqu'il avait été d'abord maître d'hôtel d'Antoine, duc de Brabant. Il usa de son droit sur une futaille qu'on avait effondrée; mais il l'abandonna à la condition qu'on en établirait une nouvelle. Lyonnel fut mayeur de 1417 à 1422; il occupa les mêmes fonctions de 1431 à 1432.
Dans cet espace de temps, nous voyons revenir à plusieurs reprises Jean Sacquespée et Jean Paris, dit Dragon (1425 à 1427 et 1433 à 1435). On se rappelle les agitations du XVe siècle, les sanglantes querelles des Armagnacs et des Bourguignons, la bataille d'Azincourt, et enfin ce traité d'Arras de 1435; qui rendit la paix à l'Europe et termina une guerre centenaire.
Il y a un grand nombre de familles Paris; celle d'Artois porte d'azur à une merlette d'or.

Colart Leborqne fut mayeur en 1435. Il exerça ces fonctions en 1436, et fut remplacé en 1437 par Robert Pipelaërt, puis renommé, mais pour un an seulement. La famille Leborgne portait pour armoiries; d'azur au lion léopardé d'or, à la bande d'argent chargée de 8 losanges accolés de gueules. Nous ne trouvons dans les registres municipaux que deux bourgeois de ce nom; Jacquemont, dit Mahon, en 1390, et Jean en 1468.
Antoine Sacquespée fut mayeur de 1443 à 1445; il eut pour successeur Guillaume Lefebvre, qui fut mayeur de 1445 à 1447, et de 1449 à 1451. Nous avons à redire les armoiries des Lefebvre. Dans le nord de la France, tant de personnes portent ce nom qu'il est difficile de trouver un point de repère. Carpentier, dont on connaît la hardiesse, n'ose citer aucune famille. Cependant, si nous ne trouvons pas dans les registres échevinaux la mention de Lefebvre, ses armoiries nous ont été conservées; elles étaient: d'azur au chevron d'or surmonté d'une tour d'argent et accompagné en chef de deux étoiles d'or et en pointe d'une ancolie du même.

Nous trouvons un Merlande, marié à demoiselle Antoinette, anobli au XVIIIe siècle par l'acquisition d'une charge. Nous voyons en 1451 Jacques Valois. Le duc de Bourgogne lui avait fait don de la charge de mayeur pour en jouir toute sa vie, par lettres patentes du 23 juillet. Il ne posséda pas longtemps cette charge, puisqu'il fut remplacé l'année suivante par Jacques le Josne. Il y a un si grand nombre de familles de Valois que nous n'osons désigner celle à laquelle appartient Jacques. Toutefois, comme il reçut un titre de Philippe-le-Bon, nous croyons devoir le rattacher à la famille originaire de Wurtemberg, qui obtint en 1846 le titre de baron, et qui portait d'argent à la fasce d'azur chargée de trois fleurs de lys d'or.
Jacques et Jean Lejosne occupent les fonctions de mayeur de 1452 à 1477. Une famille de Lejosne-Contay existe encore, descend-elle de nos mayeurs ou des Contay qui ont tenu un rang si illustre et fourni des gouverneurs à la ville d'Arras? Un manuscrit moderne indique que Jacques était fils de Robert, bailli et gouverneur d'Arras. Nous ne trouvons dans les registres municipaux ni les armoiries des Lejosne ni celles des Contay, la maison de ce nom, originaire de France, portait de gueules à une fasce d'or et une bordure d'azur.
Michel, Mikael ou Miquelet de Bernemicourt fut mayeur de 1477 à 1481. Nous trouvons dès 1396 un bourgeois d'Arras. Miquelet reçut ce titre le 10 juillet 1451, sans finances, par la protection du duc de Bourgogne; il resta fidèle à ce prince pendant cette douloureuse époque qui vit chasser tous les habitants d'Arras par le sévère Louis XI. Le roi ne se contenta pas d'exclure les habitants: il changea même le nom de la ville, qui s'appela Franchise. Louis XI avait choisi ce nom pour y attirer une foule d'étrangers, qui vinrent de toutes les parties de la France. La famille Bernemicourt portait alors de sable semé de fleurs de lys d'or. Est-ce un souvenir du passage de Louis XI? Plus tard, ses armoiries furent d'azur au chef d'argent, qui est de Salusse.

Nous rencontrons ensuite Antoine Clavan, qu'une monographie manuscrite des Mayeurs d'Arras nous désigne comme ayant rempli ces fonctions; nous n'avons trouvé ni le nom ni les armoiries de ce seigneur dans les registres échevinaux; nous ne le voyons figurer dans aucun armorial artésien. Était-ce un de ces favoris qu'employait Louis XI pour assurer son pouvoir?
En 1481, nous trouvons Jehan Trochet, nom encore inconnu de nos généalogistes, puis Jean de Beaumont, mayeur de 1484 à 1486, Jean Lemaire, dit Grisard (nom sous lequel est encore désigné le blaireau dans l'Artois), et son fils, de Lallart.
Nous arrivons en 1554 à Louis de Blondel, écuyer, seigneur de Beauregard; ici encore, nous nous trouvons en présence d'une vingtaine de familles qui portent le même nom. Les Blondel de Beaurepaire portent de sable à la bande d'or. Louis de Blondel récréanta sa bourgeoisie le 23 janvier 1550; nous trouvons parmi les Blondel un bailli des ville et marquisat de Roubaix, et le 3 septembre 1551, Antoine de Blondel, qui acheta les hauts bois d'Havrincourt.

Philippe le Prevost, écuyer, mayeur, licencié ès-lois, avait, à plusieurs reprises, été nommé échevin; il fut placé à la tête du magistrat d'Arras, selon les Registres aux bourgeois, en 1556, et d'après une liste dressée à la mairie de cette ville, en 1560. Il portait de gueules à trois hures de sanglier d'or. Philippe le Prévost eut quelques difficultés avec les échevins pour des droits de préséance.
Ponthus d'Assonleville, écuyer, fut mayeur de 1575 à 1578. Il éleva des prétentions sur les arbres plantés sur les remparts, mais il fut débouté de sa demande. Il était originaire de Douai et seigneur de la Couture. Sa famille avait des représentants parmi les bourgeois d'Arras depuis 1524 ; elle portait pour armoiries : d'argent à la fasce de sable chargée de trois molettes d'éperon d'or.
Pierre Deroillers fut mayeur pendant vingt ans (1578-1598). Il traversa les sanglantes agitations des Verts-vêtus, montra de l'énergie et fut toujours dévoué aux princes, comtes d'Artois, qui l'anoblirent le 10 juillet 1596, et lui donnèrent pour armoiries: d'argent au chevron accompagné en chef de deux trèfles et en pointe d'une merlette, le tout de sable.

Antoine le Merchier, qui portait de sable à la bande d'or chargée de trois étoiles d'azur, occupa les fonctions de mayeur de 1598 à 1601. Il éprouva dès le début quelques difficultés avec l'échevinage. Il avait acheté les fonctions de mayeur de Dervillers, vieillard infirme, et l'on protestait contre cette vente d'office. Toutefois, ces difficultés furent aplanies, mais on a lieu de penser que l'accord ne fut jamais complet. Les Mayeurs, on se le rappelle, avaient les bois hors de service. Un feu de joie avait été allumé sur la grande place pour célébrer le retour de l'Artois et des provinces belges à une nationalité indépendante. Le cardinal Albert, après avoir été relevé de ses voeux, venait d'épouser l'infante Isabelle. Le mayeur s'était emparé du bois qui n'avait pas été consumé, il fut obligé de le remettre aux échevins. Le Merchier fut anobli moyennant 500 livres en 1600.

Le XVIIe siècle nous montre les fonctions de mayeur devenant chaque jour plus importantes. Nicolas Duval, seigneur du Natoy, licencié ès-lois, conseiller au Conseil provincial d'Artois, en prit possession en 1601. Cependant, une sentence rendue à l'élection d'Artois en 1592 le déclare noble, et d'après le Registre aux bourgeois, lui donne la qualité de mayeur; c'est la conséquence d'une de ces erreurs si fréquentes à cette époque où les transcriptions étaient tardives. Duval, qui avait épousé damoiselle Isabeau Couronnel, dame de la Tramerie, portait pour armoiries: d'argent au lion de sable armé et lampassé de gueules, à la bordure dentelée de gueules. Les échevins protestèrent, parce qu'il était lié par des liens de parenté avec plusieurs membres du Magistrat, mais la protection des archiducs Albert et Isabelle le firent triompher de ces difficultés. Un règlement fixa les droits de préséance dans les cérémonies publiques : le mayeur devait marcher avec les échevins aux honrieurs, mais il devait, comme eux, porter la boucle. Les archiducs lui permirent de céder sa charge à son fils, Jacques Duval, seigneur du Natoy. Il était autorisé à conserver le titre de mayeur honoraire, et si son fils venait à mourir, il rentrait en fonctions. Un autre arrêté du Conseil privé de Bruxelles le nomma député pour le Tiers-État, lui accorda de précéder le mayeur et les échevins dans toutes les assemblées des États.

Un fait important se passa sous son administration: les troupes royales envahirent Arras, et cette ville resta depuis lors soumise à la France. Les habitants, attachés aux successeurs de la maison de Bourgogne et de leurs comtes, se défendirent avec énergie, et Duval, notamment, se signala par sa fermeté. Le gouvernement français respecta son courage et lui conserva ses fonctions pendant deux ans encore (1642).
Le titre de mayeur resta vacant pendant près d'un an ; les fonctions en furent remplies par le premier échevin d'Arras. Enfin, en 1643, Antoine de Belvalet fut nommé. II appartenait à une famille originaire du comté de Saint-Pol qui, au XVIe siècle, possédait le fief de Belval ou Belvalet, près de cette ville. Elle fournit plusieurs illustrations militaires, et se signala surtout par sa piété et les nombreux établissements charitables ou religieux qu'elle fonda à Arras. Ses armoiries étaient: d'argent au lion morné de gueules. Antoine de Belvalet avait montré beaucoup de prudence et de modération pendant les troubles qui avaient précédé et suivi le siége d'Arras; aussi sa nomination fut-elle très-populaire. Toutefois, des difficultés s'élevèrent sur la manière dont il prêterait le serment. Il fut député à la Cour de la part du Magistrat et mourut à Paris après avoir obtenu la survivance de sa charge en faveur de son fils, Ignace de Belvalet. Le roi avait mis pour condition qu'il attendrait l'âge de sa majorité.
Pendant six ans (1654-1660), les fonctions de mayeur furent donc exercées par Adrien Payen, seigneur de Haute-Cote, lieutenant de la gouvernance d'Arras. La famille Payen est l'une des plus anciennes de la ville: dès 1396, Gilles Payen récréanta sa bourgeoisie. Philippe II, roi d'Espagne, lui accorda gratis, le 19 mai 1582, des lettres de ratification ou d'anoblissement, autant que besoin, datées de Lisbonne. La famille Payen porte: d'or à l'aigle de sinople, becquée et membrée de gueules, au franc-canton de gueules charrié de trois bandes de vair.
Ignace de Belvalet ne fut mayeur que pendant six ans, de 1660 a 1666. Nommé capitaine au régiment d'Espagne (infanterie), il céda ses fonctions à son beau-frère, Dominique de Venant. Toutefois, des lettres royales du 14 avril 1671 lui maintinrent le titre honorifique de mayeur après la mort de Joseph Boudard, son cousin.

Ignace de Belvalet céda sa charge de mayeur à Louis Deslyons, moyennant une rente viagère.
La famille de Venant d'Yvergues (d'or à la bande componée de gueules et d'hermines de sept pièces, accostée de deux fleurs de lys d'azur) avait des bourgeois d'Arras dès 1535. Dominique, seigneur de Saternau, était fils unique de Vincent de Venant, seigneur de Grincourt. Il obtint des lettres de chevalerie pour lui et ses descendants au mois de septembre 1664.
Joseph Boudart (d'azur au croissant d'or, accompagné de trois coquilles d'argent) appartenait à une famille originaire de Normandie : il était allié à la famille de Belvalet. Cette maison eut plusieurs illustrations militaires.
Louis Deslyons, mayeur par suite d'un traité avec Ignace de Belvalet, exerça ces fonctions de 1635 à 1652. Il portait pour amoiries : Écartelé aux 1 et 4 d'argent à quatre lions de sable armés et lampassés de gueules, aux 2 et 3 d'argent à trois fleurs de lys au pied nourri de gueules. Cette maison compte des bourgeois d'Arras dès 1396; elle eut des lettres confirmatives de noblesse sans finance en 1653; elle fit ériger en baronnie, en juillet 1714, la terre de Locon, près de Béthune.

A cette époque, la charge de mayeur est cédée à titre viager, puis pour trois ans, et enfin elle est rachetée par la ville.
Nicolas-François Boucquel fut mayeur d'Arras de mars 1692 à 1718. (Écartelé aux 1 et 4 de gueules à l'écusson d'argent, aux 2 et 3 d'azur à la fasce d'or.) Cette famille fut anoblie par une charge de secrétaire du roi à la chancellerie de Paris en 1683; des lettres de chevalerie lui furent accordées en 1723. Le pouvoir du mayeur s'était augmenté: il présidait au renouvellement de l'échevinage et à l'audition des comptes. Par suite de la suppression de la charge de maire, rachetée par la ville d'Arras, François Deslyons fut nommé maire en 1718, puis en 1719, Nicolas Boucquel reprit ses fonctions, moyennant le paiement de douze mille livres.

Nouvelle suppression en 1722, sous le titre d'avénement de la reine, nouvelle imposition pour Boucquel, puis de nombreuses difficultés tant avec la ville qu'avec les intendants. Fatigué de ces difficultés, Boucquel vend à Guislain de Croix, qui ne paraît pas avoir exercé; le roi ordonne à la ville de rembourser Boucquel et de lui présenter trois candidats, parmi lesquels, malgré les réclamations de de Croix, il choisit Guislain-Joseph Quarré de Repaire. Il y a plusieurs familles Quarré : l'une en Brabant, portant le titre de comte; une seconde dans le Cambrésis; les Quarré d'Aligny, en Bourgogne, et les Quarré de Verneuil, dans la même province; les Quarré d'Artois portent: d'azur au chevron d'argent accompagné de trois besants du même chargés chacun d'un filet de sable mis en demi-cercle; ledit chevron chargé en chef d'une étoile de sable et en bas de chaque côté d'une merlette de même affrontée. Ces armoiries sont plus fidèles que celles qui sont blasonnées dans le Registre aux bourgeois. Quarré de Beaurepaire obtint des lettres de chevalerie en 1724. Il fût mayeur de 1729 à 1743. La Cour de France épuisée multipliait les offices et en faisait publiquement trafic. Le bruit courut que l'office de mayeur allait être de nouveau vendu. Quarré eut peur; il offrit 50,000 livres dont le montant serait employé à la construction d'un hôtel pour le gouverneur. Le Magistrat accepta, et, moyennant intérêts, cette somme servit à l'acquisition de l'hôtel dit de Gommicourt, près d'une rue qu'une galante aventure de Louis XV fit nommer la ruelle du Scandale. En reconnaissance, le Magistrat accorda au mayeur le droit de délibération, mais à l'exclusion de ses successeurs.

A la mort du mayeur, arrivée en 1743, Charles Guislain Boucquel, seigneur de Valhuon, présenta au Magistrat les orphelins Quarré, et s'offrit pour remplir les fonctions de mayeur, jusqu'à ce que l'un d'eux eût l'âge voulu. Cette offre fut acceptée et par les échevins et par le gouvernement. Le mayeur devient chaque jour plus puissant, et bientôt il réduira jusqu'à néant les prérogatives de ces fiers échevins du moyen âge. Boucquel était mousquetaire; en vain le roi de France avait déclaré que nul homme d'armes ne pouvait remplir les fonctions de magistrat. Boucquel présida au renouvellement de la loi, présenta les clefs de la ville au roi Louis XV, lors de son voyage à Arras, et après avoir pris sa retraite du service militaire, administra en son nom.
Sous l'administration de Charles Quarré, 1754-1764, des modifications furent apportées au corps échevinal par suite de la réunion de la cité à la ville d'Arras. On trouve en effet ce fait singulier: deux villes portant le même nom, placées l'une contre l'autre, et fortifiées chacune contre sa voisine.
Un édit du 8 novembre 1764 donne les fonctions de mayeur à Charles-Louis-Alexandre de Beauffort. Cette famille est ancienne. Rietstap blasonne ainsi ses armoiries : de gueules à trois jumelles d'argent. M. P. Roger, dans Noblesse et chevalerie, ajoute qu'un cadet de cette maison ayant épousé en 1310 l'héritière.de Gironvilliers, prit les armes de cette dernière famille, qui étaient: de gueules au château à l'antique d'argent, et y joignit les siennes en franc-canton. Ses descendants ont repris les armes pleines. Les armoiries que nous avons sous les yeux sont: de gueules au château fortifié et pont-levis d'argent surmonté de deux girouettes aux baus de sable, un franc-canton d'or et d'azur composé de six bandes. Charles de Beaufort avait à plusieurs reprises été le représentant de la cour des États d'Artois pour la noblesse. Comme on le voit, on s'efforce surtout de mettre à la tête du mouvement échevinal des hommes influents: tel était M. de Beauffort, dont les ancêtres avaient pris part aux croisades et possédaient de nombreuses terres seigneuriales.

Les fonctions de mayeur n'étaient occupées que pour trois ans; nous trouvons en 1765 et en 1771 Adrien-Antoine de Bloquel de Croix, chevalier de Wismes; cette famille, anoblie le 24 novembre 1626, portait d'argent au chevron de gueules accompaqné de trois merlettes de sable.
Charles de Beauffort reprit par élection les fonctions de mayeur de 1769 à 1771.
Mais en 1774, nous trouvons Jules-François de Raulin, seigneur de Belval. Il y a deux familles de ce nom: l'une du Périgord, qui eut quelques membres en Artois; l'autre, anoblie le 31 décembre 1593, portait pour armoiries, selon Rietstap, d'argent à trois roses de gueules boutonnées d'or barbées de sinople. L'écusson que nous avons sous les yeux porte au centre un coeur d'or blessé de gueules. Lors de sa nomination, il était capitaine au régiment de Royal-Italien. Il mourut en 1785, maréchal de camp des armées du roi. Après avoir acheté de la famille de Hauteclocque le fief de Belvalet, il fut admis aux États d'Artois, il avait repris les fonctions de maire en 1784. Il les exerça jusqu'à sa mort.
Ignace-Godefroy de Lannoy, comte de Lannoy et du Saint-Empire, chevalier, seigneur de Beaurepaire, fut mayeur de 1781 à 1784. Il y eut plusieurs familles de ce nom. Celle dont nous nous occupons était originaire de Belgique: elle portait pour armoiries: d'argent à trois lions de sinople armés et lampassés de gueules, couronnés d'or. Le comte de Lannoy était chevalier de Saint-Louis et capitaine au régiment Royal-Infanterie. Une fois de plus, constatons que les fonctions de maire sont presque toujours accordées à des serviteurs dévoués à la France, c'est une retraite pour les anciens militaires.

En 1786, le mayeur est Lamoral, baron d'Aix: c'est la dernière nomination royale. Cette famille, qui, dès le XIVe siècle, exerçait les fonctions échevinales, est essentiellement artésienne. Ses armoiries sont d'argent à trois merlettes de sable; d'autres généalogistes veulent de gueules. Lamoral d'Aix faisait partie de l'ordre de la Noblesse aux États d'Artois; il prit une part importante aux discussions de cette assemblée, qui était chargée des intérêts les plus sérieux de la province. Malgré les services qu'il avait rendus, il porta sa tête sur l'échafaud révolutionnaire.
En 1789, les fonctions de maire furent confiées à Ferdinand Dubois de Fosseux. Il y a un grand nombre de familles du nom de Dubois. Celle dont nous nous occupons porte d'azur à trois coquilles d'or ; elle descend de Simon Dubois, qui était originaire de la ville de Douai et attaché au service; il obtint des lettres d'anoblissement au mois de janvier 1677. Ferdinand Dubois mourut à Paris le 28 décembre 1817.
Nommons encore François-Joseph Fromentin de Sartel. La maison de Fromentin est originaire d'Hesdin. Le premier bourgeois d'Arras que nous trouvons sous ce nom est désigné en 1568 sous le titre de praticien. Henry Fromentin, licencié en médecine, fut reçu gratis, à condition de donner des soins aux indigents. Son fils fut avocat au Parlement de Paris. Il fut père d'un conseiller au conseil provincial d'Artois. Ses armoiries étaient: de sinople semé de roses d'argent, au lion du même brochant sur le tout, au chef d'argent chargé de trois quintefeuilles de gueules. Fromentin de Sartel n'occupa que pendant un an les fonctions de maire; il les obtint de nouveau l'an III de la République.
Nous n'avons pas à citer tous ceux qui furent désignés par l'élection, encore moins à retracer cette histoire si sanglante de la Révolution à Arras. La constitution de l'an VIII réserva au pouvoir exécutif le droit de nommer les maires. Le premier fut Mathias-René-Joseph Watelet de la Vinelle. Il appartenait à une famille honorable qui avait fourni des membres du conseil d'Artois, lui-même en avait fait partie. Sous son administration (1800-1814), il s'attacha à porter l'ordre dans l'administration, à faire refleurir la religion catholique, en un mot, à guérir toutes les blessures faites par une agitation qui avait duré près de dix ans. Il mourut en 1823, doyen du conseil de préfecture, entouré de l'estime et de l'affection de tous. La famille Watelet portait d'or à trois souches de sable, 2 et 1.

Après la courte administration de M. Jacques Vaillant, son gendre, M. Wartelle, baron d'Herlincourt, fut appelé à lui succéder. Les armoiries de la famille Wartelle, et non Wartel, comme l'écrit M. Plouvain, sont d'azur au chevron d'or accompagné de deux étoiles en chef et d'un croissant en pointe, le tout d'or.
Les agitations politiques forcèrent M. le baron d'Herlincourt à résigner les fonctions de maire, en 1816. Il eut pour successeur le baron Lallart. Il portait pour armoiries : d'or au chevron de gueules accompagné en chef de trois étoiles de sable et en pointe d'un croissant du même.
En 1822, il se démit de ses fonctions en faveur de Maioul de Sus Saint-Léger, qui portait: d'argent au chevron de sinople accompagné en chef de deux têtes de lions de gueules et en pointe d'un croissant de sable. La famille Maioul a fourni des bourgeois d'Arras en 1611 ; plusieurs de ses membres furent attachés au conseil provincial d'Artois.

M. Léopold, baron de Hauteclocque, fut nommé maire en 1826. Il était le plus jeune maire de France. Cette famille est l'une des plus anciennes de l'Artois, et nous trouvons à la salle des croisades son écusson : D'argent à la croix de gueules chargée de cinq coquilles d'or. La maison de Hauteclocque, dont la piété égalait la valeur, fit de nombreuses libéralités aux monastères et aux églises de la province; dès le commencement du XIIIe siècle, on trouve parmi ses membres de nombreux hommes d'armes; elle compte un légat du pape; elle avait ses entrées aux États d'Artois; elle fournit des religieuses aux chapitres nobles, notamment à celui d'Etrun; elle est l'une des plus illustres comme des plus anciennes de la province. M. le baron de Hauteclocque avait la réputation méritée d'être l'un des plus savants généalogistes de l'Artois, et sa belle bibliothèque était ouverte à tous les érudits.

Nous clorons, avec le nom de cet homme si dévoué au pays, la nomenclature des Mayeurs et Maires d'Arras qui ont appartenu à la noblesse.