DE LA PORTE : ARMOIRIES DES PRINCIPALES VILLES DE FRANCE

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TRESOR HÉRALDIQUE d'après d'Hozier, Ménétrier, Boisseau, etc., contenant : Le Recueil des Armoiries des Villes et Provinces;
Par A. de La Porte, Membre de plusieurs sociétés historiques et archéologiques. 1864

ARMOIRIES DES PRINCIPALES VILLES DE FRANCE

APERÇU HISTORIQUE ET GEOGRAPHIQUE

ALSACE

BOURBONNAIS

LIMOUSIN

LYONNAIS

LORRAINE

NIVERNAIS

POITOU

BOURGOGNE

FLANDRE

BERRY

ANGOUMOIS

FRANCHE-COMTÉ

ARTOIS

ORLEANAIS

SAINTONGE ET AUNIS

DAUPHINÉ

PICARDIE

TOURAINE

GUYENNE

COMTAT VENAISSIN

CHAMPAGNE

ANJOU

GASCOGNE

SAVOIE ET NICE

ILE DE FRANCE

MAINE

BEARN

PROVENCE

NORMANDIE

AUVERGNE

FOIX

ROUSSILLON

BRETAGNE

MARCHE

LANGUEDOC

ILE DE CORSE

APERÇU HISTORIQUE ET GEOGRAPHIQUE.

Dans le morcellement féodal qui se fit du grand Empire de Charlemagne sous ses indolents successeurs, le territoire qu'avait occupé l'ancienne Gaule, c'est-à-dire la France actuelle, se trouva divisé en 61 Etats, fiefs ou arrière-fiefs, gouvernés chacun par des comtes, des ducs ou des princes indépendants sur lesquels l'héritier de la couronne ne conservait qu'une autorité purement nominale et fictive. C'étaient, parmi les principaux, au Sud, les comtés de Toulouse, de Foix, de Rhodez, d'Angoulême, de Poitiers, les duchés de Septimanie, de Gascogne, d'Aquitaine, le Dauphiné, le comté d'Auvergne, la seigneurie de Montpellier, la vicomté de Béarn, etc; au Nord, les comtés de Flandre, de Vermandois, de Champagne, d'Anjou, les duchés de France, de Normandie, de Bretagne, de Bourgogne, etc. A son tour, chacun de ces petits Etats s'était divisé en une infinité de baronies et seigneuries, dont les possesseurs se montraient pareillement fort jaloux de leurs droits, privilèges et prérogatives, et n'accordaient d'obéissance à leurs suzerains que ce qu'il leur était absolument impossible de refuser. Ce mode de gouvernement a été comparé par un ingénieux historien à la grande rosace qui couronnait la principale porte des églises gothiques, laquelle était composée d'autres roses moins grandes composées elles-mêmes d'autres roses moins grandes, encore, qui en contenaient un grand nombre de plus petites, remplies de verres de diverses couleurs. Il se perpétua jusqu'à ce que l'un de ces petits souverains plus habile, plus ambitieux et plus fort que les autres, eut fait disparaître toutes les limites, supprimé toutes les divisions, éteint toutes les autocraties et réuni sous une seule main, sous une seule volonté, les fils moteurs de toutes ces administrations isolées.
Ce grand oeuvre fut entrepris par Hugues Capet, duc de France, comte de Paris et d'Orléanais (987), qui, après avoir dépossédé les héritiers de Charlemagne de leur vain titre, transmit à sa race la féconde ambition de profiter de l'admirable situation du petit Etat qu'elle possédait dans le bassin de la Seine, pour réunir tous les autres Etats de l'ancienne Gaule autour de ce pays central, appelé alors exclusivement la France, et que les géographes du seizième siècle ont improprement dénommé Ile de France . Alors commença ce grand travail d'unification que la monarchie française a poursuivi sans relâche depuis huit siècles, et dont le récit méritait plus d'extension que je n'en puis donner ici.
En 1062, le Gatinais fut acquis par Philippe Ier, de Foulgues, comte d'Anjou.
En 1082, le Vexin français fut acheté par le même Philippe, de Simon, comte de Valois, qui se fit religieux.
En 1100, la vicomté de Bourges fut également acquise par Philippe Ier, du comte Herpin, qui partait pour la croisade.
En 1183, le Vermandois et l'Amiénois furent acquis par Philippe-Auguste, d'Aliénor, héritière de ce comté, à cause du secours qu'il lui donna contre Philippe, comte de Flandre.
En 1185, le Valois fut encore acquis par Philippe-Auguste de la même personne, et pour la même cause.
En 1198, le comté d'Auvergne fut confisqué par Philippe-Auguste, sur le comte Guy; mais il fut depuis souvent donné en apanage, et ne rentra définitivement à la couronne qu'en 1610, sous Louis XIII.
En 1200, le comté d'Evreux fut ajouté par le même prince, qui en fit la conquête, mais il fut depuis souvent donné en apanage, et ne revint définitivement à la couronne qu'en 1584 sous Henri III.
En 1203, la Touraine, l'Anjou, le Maine et le Poitou furent confisqués par Philippe-Auguste sur Jean-sans-Terre, et réunis au domaine royal, par Louis IX, en 1258.
La Saintonge, confisquée sur Jean-sans-Terre en même temps que la Touraine et le Poitou, fut cédée aux Anglais par le traité de Bretigny, et reconquise par Charles V et Charles VII.
En 1205, la Normandie fut confisquée par Philippe-Auguste, sur Jean-sans-Terre, et ne fut plus distraite de la couronne que pendant de courtes périodes.
En 1215, le comté d'Alençon revint à Philippe-Auguste à l'extinction de la famille des comtes héréditaires.
En 1229, la vicomté de Béziers, le duché de Narbonne, la vicomté de Nimes, le Velay, l'Albigeois, furent acquis par saint Louis, après la guerre des Albigeois.
En 1233, les comtés de Blois et de Chartres furent achetés, par saint Louis, de Thibault, comte de Champagne.
En 1255, le Gevaudan fut acquis par saint Louis du comte de Barcelone.
En 1257, le Perche fut réuni à la couronne par saint Louis, à l'extinction de la famille des comtes héréditaires.
En 1270, le Languedoc, le Vivarais et le Rouergue furent réunis par Philippe III à l'extinction de la maison de Saint-Gilles.
En 1285, la Champagne et la Brie furent acquises par Philippe IV, au moyen de son mariage avec l'héritière de Thibault.
En la même année, le Lyonnais fut acquis par Philippe IV, par un accord avec l'archevêque et les bourgeois de Lyon.
En 1349, le Dauphiné fut légué à Philippe VI par le dernier dauphin de Viennois.
En 1370, le Limousin fut conquis par Charles V sur les Anglais, moins la vicomté de Limoges qui ne fut réunie à la couronne que sous Henri IV en 1589.
En 1450, la Guyenne et la Gascogne furent conquises par Charles VII sur les Anglais.
En 1479, la Bourgogne, le Ponthieu et le Boulonnais, furent réunis à la couronne par Louis XI, après la mort de Charles-le-Téméraire.
La même année, le roi confisqua la Marche sur la maison d'Armagnac.
En 1486, la Provence fut réunie par Louis XI après la mort du dernier comte.
En 1523, l'Angoumois, le Forez et le Beaujolais furent apportés à la couronne par l'avènement de François Ier, dont ils formaient le patrimoine.
En 1531, le Bourbonnais fut confisqué par François Ier sur le connétable de Bourbon.
En 1547, la Bretagne fut acquise par suite des mariages de Charles VIII et de Louis XII avec Anne de Bretagne, et de celui de François Ier avec sa fille.
En 1548, le comté de Comminges fut réuni par l'extinction de la famille des comtes héréditaires.
En 1552, les Trois-Evêchés furent conquis par Henri II, mais cette possession ne fut légitimée qu'en 1648.
En 1589, le Béarn, la Navarre, le Bigorre, le comté de Foix, l'Armagnac et le Périgord, furent réunis à la couronne par l'avènement au trône de Henri IV, qui en était héritier.
En 1601, la Bresse et le Bugey furent échangés avec le duc de Savoie, contre le marquisat de Saluce.
En 1648, fut légitimée la possession de l'Alsace conquise par Louis XIII et Louis XIV.
En 1659, le Roussillon et l'Artois, conquis par Louis XIII et Louis XIV, furent légitimés par le traité des Pyrénées.
En 1665, le Nivernais revint à la couronne par la mort de Charles de Gonzague.
En 1668, la Flandre et le Hainaut, conquis par Louis XIV, furent légitimés par la paix d'Aix-la-Chapelle.
En 1678, la Franche-Comté, conquête de Louis XIV, fut légitimée par le traité de Nimègue.
En 1684, le Charolais fut confisqué sur la maison autrichienne d'Espagne.
En 1766, la Lorraine et le Barrois furent achetés par Louis XV, après la mort du roi Stanislas.
Enfin, en 1768, la Corse fut achetée aux Gênois; en 1791, le comtat Venaissin et Avignon furent confisqués par décret de l'Assemblée nationale, et, de nos jours, la Savoie et Nice, cédées par la paix de Villafranca, viennent de compléter l'oeuvre d'assimilation .
A mesure que l'Etat s'agrandissait, les familles jadis souveraines s'éteignaient, et s'il n'en était pas de même de celles qui tenaient des fiefs ou des arrière-fiefs; et que leur nouvelle position rattachait plus ou moins directement au roi, on ne peut nier que leur puissance fut restreinte, et leur indépendance amincie, à mesure qu'ils se rapprochaient du vasselage de la couronne.
En même temps, et comme si cette oeuvre de l'abaissement des grands vassaux au profit de l'absolutisme royal n'eut pas marché assez vite, les rois Capétiens, dès le temps de Louis-le-Gros (1110), commencèrent à autoriser la création des communes, c'est-à-dire, les associations formées par les habitants d'une ville, pour se défendre contre les exactions et les violences des nobles et des seigneurs. Moyennant une faible redevance, les cités importantes purent bientôt avoir un maire, des échevins, une justice, une milice, un sceau, c'est-à-dire tous les privilèges de la noblesse attribués à l'être collectif, qui prenait le nom de municipalité. Les municipalités ayant un sceau demandèrent à y graver des armoiries, comme celles que les familles nobles, dont elles devenaient les égales, portaient sur leurs bannières. On leur en fit, ou elles s'en attribuèrent, et ainsi naquit en France l'usage des armoiries des villes, par imitation des armoiries des nobles, des armoiries des provinces, des armoiries du roi et du royaume.
Il n'y a point lieu de douter que les armoiries des villes, en France, aient une origine féodale, comme celles des individus. Elles ne sont pas plus l'imitation des emblèmes des villes de l'antiquité, de l'aigle, symbole de Rome, ou du hibou, symbole d'Athènes, que les armoiries des chevaliers n'étaient l'imitation des devises de Cyrus, de Xerxès, ou des héros de la Grèce et de Rome. Les communes, en adoptant des écussons et des armoiries, crurent y trouver un moyen de s'élever à la hauteur des familles qui les avaient jadis gouvernées, ou du moins de leur montrer leur indépendance, de faire devant elles parade de leurs privilèges; et cet esprit d'imitation devint si puissant, que tout ce qui, à tort ou à raison, jouissait de quelque immunité ou de quelque faveur spéciale, toutes les corporations, tous les couvents, toutes les cours de justice, tous les chapitres, toutes les académies, se mirent à avoir leurs devises, leur cachet et leurs bannières.
Je m'empresse de dire que ces armoiries municipales ne sont, pour la plupart, qu'une oeuvre de capricieuse vanité. Si quelques-unes sont authentiquement décrites et reconnues par les chartes royales, le plus grand nombre ont été choisies à plaisir, n'ont aucun droit à la protection des lois et ne rappellent aucun souvenir héroïque; mais elles ont été conservées par les villes comme symbole de leurs anciennes franchises, ont pris place dans l'histoire par l'usage et la prescription, et présentent à l'antiquaire un intérêt héraldique presque aussi grand que celui qui s'attache aux armoiries des anciennes races nobles. Voilà pourquoi, après avoir fait suivre la Clef du blason, d'une série d'exemples choisis dans l'armorial de la noblesse, j'ai voulu le compléter par une deuxième série d'écussons empruntés à celui des communes.
Le plan que j'ai adopté pour ce travail n'est pas en rapport avec la division actuelle de la France pour plusieurs raisons. Il me semble que la division en départements est tout à fait malheureuse. Ce partage mathématique, qui a été fait avec une si grande ignorance de la géographie physique, des divisions naturelles, et avec un si profond mépris des différences d'origines, de la diversité de moeurs, des souvenirs de l'histoire, me semble de beaucoup inférieure à l'ancienne division faite par Colbert en trente gouvernements, et qui (en y ajoutant la Lorraine et l'Artois) subsistait encore au moment de la Révolution Française, car ce partage était basé sur des agglomérations naturelles de peuples. D'une autre part, comme il s'agit ici de décrire des usages d'origine féodale, il n'y a aucun inconvénient à adopter les divisions territoriales qui existaient à l'époque féodale elle-même. C'est donc celle dont je me servirai comme étant la seule politique et historique, en la combinant toutefois avec la division officielle et administrative par départements.
Nous obtiendrons ainsi, avec les Etats de nouvelle annexion, trente-six provinces qui sont: l'Ile de France, la Picardie, la Normandie, la Champagne, la Bourgogne, la Bretagne, la Provence, le Dauphiné, le Nivernais, le Berry, le Poitou, l'Aunis, l'Anjou, le Maine, la Touraine, l'Orléanais, la Marche, l'Auvergne, le Bourbonnais, le Lyonnais et Beaujolais, la Navarre et Béarn, la Guyenne, la Gascogne, la Saintonge et l'Angoumois, le Limousin, Foix, le Languedoc, le Roussillon, l'Alsace, la Flandre et Hainaut, la Franche Comté, la Lorraine, l'Artois, le Comtat Venaissin, la Corse, la Savoie et Nice.

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